
L’Office de Protection du Citoyen (OPC) alerte sur les conditions précaires des centres de détention en Haïti
Une délégation de l’Office de Protection du Citoyen (OPC), dirigée par le magistrat Jean Wilner Morin, Protecteur du Citoyen, accompagnée de Me Amoce Auguste et Me Jude Jean-Pierre, a effectué une visite d’inspection dans plusieurs centres de détention de la région métropolitaine. Ces visites incluaient le Centre de Rééducation des Mineurs en Conflit avec la Loi (CERMICOL), le Commissariat de Pétion-Ville, le Sous-Commissariat de Canapé Vert, le Commissariat de Delmas 33, et la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ).
Au CERMICOL, construit initialement pour accueillir des mineurs en conflit avec la loi, la situation s’est fortement détériorée. Prévu pour une quarantaine de mineurs, le centre accueille désormais 86 mineurs, 149 femmes, dont 18 condamnées, et 146 hommes. Ce mélange des catégories de détenus, incluant des mineurs et des adultes, va à l’encontre des principes fondamentaux du droit international, notamment la présomption d’innocence et la séparation des mineurs des adultes.
En plus du surpeuplement, les mineurs n’ont accès ni à des activités éducatives, ni à une formation professionnelle ou des loisirs. La cohabitation avec des détenus adultes, transférés de la prison civile de Port-au-Prince, expose les mineurs à des influences négatives et compromet leur réhabilitation.
Au Sous-Commissariat de Canapé Vert, la délégation a constaté la détention de 36 personnes, dont 11 policiers, dans des conditions précaires. Le respect du délai légal de présentation des détenus devant un juge est systématiquement ignoré, violant ainsi leurs droits fondamentaux.
À la DCPJ, transformée en centre de détention prolongée depuis février 2024, 91 personnes, réparties dans des cellules surpeuplées, vivent dans des conditions insalubres. Parmi elles, des mineurs, des femmes, et même des détenus étrangers sont retenus sans respect des garanties judiciaires.
Face à ces constats inquiétants, l’OPC recommande :
- La séparation stricte des mineurs des adultes pour garantir leur protection et leur réinsertion sociale conformément à la Convention des Droits de l’Enfant.
- La mise en œuvre d’une justice spécialisée pour les mineurs, avec des tribunaux dédiés, des juges formés et une médiation pénale favorisant des solutions à l’amiable.
- Le respect des délais légaux pour les détenus en attente de jugement, afin de préserver leur dignité et leur droit à un procès équitable.
- Une réorganisation des tribunaux de première instance (TPI), avec des juges spécialisés en matière civile, commerciale et pénale, pour assurer une gestion plus efficace des audiences correctionnelles et criminelles.
Pour l’OPC, la détention ne doit pas se limiter à une fonction punitive, mais doit également préparer les détenus à une réintégration sociale réussie. En transformant les prisons en lieux de rééducation et de réinsertion, l’État pourrait répondre aux exigences des droits humains tout en renforçant la sécurité publique.
Alors que la situation dans ces centres de détention continue de susciter des inquiétudes, l’OPC exhorte les autorités à prendre des mesures urgentes pour rétablir le respect des droits fondamentaux des détenus et préserver leur dignité humaine.